Quand le chien est dans
l’assiette
Au marché de Kyongdong à Séoul, on vend du chien
à consommer. Ce n’est pas facile à trouver car les Coréens ne veulent pas
choquer les Occidentaux.
Attention les vidéos inclus sur cette page
pourraientt vous arrachez le coeur. Âme sensible s'abstenir.
Le sujet est tabou. Lorsqu’on
interroge la bouchère de Kyongdong qui vend du chien, elle refuse de répondre.
C’est son voisin qui accepte de parler, le regard fuyant. « On sait que les
Français ont mené une campagne pour nous empêcher de manger cette viande… »
Il poursuit d’un ton monocorde,
à l’asiatique : « Vous n’êtes pas le premier journaliste à questionner pour la
viande de chien. Beaucoup de monde n’en mange pas en Corée, vous savez. C’est
une viande très chère. Les jeunes n’en consomment pas. Et nous ne mangeons
qu’une sorte de chien bien précise… »
Il n’en dira pas plus. Le sujet
peut fâcher. Il faudra parlementer longtemps pour prendre une photo. C’est
Julie, notre guide qui en dira davantage : « On a su que c’était votre
actrice, Brigitte Bardot qui avait mené une campagne contre nous. Cela nous a
peinés. Nous ne demandons pas aux Français pourquoi ils mangent du cheval, ou
gavent ces oiseaux pour faire du foie gras. De plus, il y a peut-être
seulement dix pour cent de gens qui en mangent… » Invérifiable. Le respect dû
à l’étranger l’empêche de dire : « La Corée, ce n’est pas que ça… En Chine, au
Vietnam, aux Philippines, c’est pareil et personne ne dit rien. »
“ Restaurants de canard ”
Sous la pression des pays
occidentaux, de la FIFA et aussi de Brigitte Bardot, le gouvernement coréen a
décidé d’interdire la consommation de chien. Sans illusion, car la tradition
remonte à la guerre de Corée, au moment où les populations mouraient de faim.
Sur le marché de Kyondong, il est impossible de rester insensible à la viande
disposée sur cet étal, avec soin, par la bouchère. Cette patte de chien qui
dépasse, c’est l’horreur totale ! L’argument nationaliste de Julie (« chacun
chez soi ») ne tient pas : les droits de l’homme et l’animal sont au-dessus
des législations nationales.
Mais le scandale ne se situe
pas là. Empêcher les Coréens de manger la viande de chien est un combat voué à
l’échec. Cependant, les associations de défense des animaux luttent pour que
le chien ne soit pas abattu dans d’atroces souffrances. Ce n’est pas gagné
d’avance.
Le gros chien jaune (la race
consommée) est élevé dans des fermes. C’est une viande maigre, facile à
digérer, paraît-il. On peut la consommer en potage (le posint’ang) ou dans des
restaurants que l’on appelle pudiquement… « restaurants de canards ».
Son succès vient de ses vertus
supposées aphrodisiaques. Seul l’homme le consomme, en général, en été : les
jours de canicule.
« Les Coréens pensent que le
pouvoir excitant de la viande de chien est proportionnel à la peur et à la
douleur de l’animal torturé », explique la KAPS (Korean Animals Protection
Société). Elle assure que « sa langue est arrachée, qu’on lui inflige des
décharges électriques, qu’on le pend puis qu’on lui donne quelques coups de
barre de fer avant de l’ébouillanter, encore respirant. » Cruauté primitive
qui mérite mobilisation et réprobation. Brigitte Bardot n’a pas tort
lorsqu’elle monte au créneau pour les chiens de Corée…
Entre chiens et chats
Au marché de Kyongdong, des
supporters de l’équipe de France ont vu ces chiens en cage. Nous avons vu
seulement des cages où se trouvaient des lapins et des poules. Disparus, les
chiens !
Il faudrait fouiner dans les
arrière-cours du marché ou se rendre dans les coins reculés de la Corée pour
en découvrir. Il existe un grand centre d’élevage dans la province de Jeju. Le
chat n’est pas mieux loti, puisque transformé en liquide, il serait censé
soulager les rhumatismes. Le goyangi soju est apprécié dans certains endroits.
Recette : chat, purée et gingembre. Le félidé aussi est ébouillanté. La KAPS
affirme que 2 millions de chiens et chats passent à la casserole en Corée. Là
encore, invérifiable. Sur les 6.000 restaurants coréens, beaucoup en
serviraient. La moyenne est tombée depuis deux ans, sous l’effet de la
pression gouvernementale. Le Coréen est obéissant.
Percer la muraille du silence
n’est pas simple et lorsque la Coupe du monde sera terminée, il faudra de la
patience pour que la Corée, terre de traditions, abandonne cette manière
bestiale de tuer. Le temps fera son œuvre. Signe encourageant : les jeunes
couples achètent de plus en plus des animaux de compagnie. Un vrai boom
économique.
Le chien a davantage sa place
dans une niche que dans une assiette. Affaire de goût.
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